Martial Verdier a créé cette série de portraits, Les Ambassadeurs, et a fait appel à quelques poètes : Sabine Macher, Phan Kim Dien, Lucien Suel, Isabelle Voisin et moi-même.
Martial Verdier a repris un procédé ancien, le callotype, qui exige une pose d’environ quinze minutes. Je sais que cela modifie la pose : au bout de quelques minutes, on fond, les défenses s’effondrent ; et il me semble que c’est soi-même, soi-même songeant, que l’on regarde. Surtout, je ne sais pas pourquoi, cela modifie le regard de qui regardera ce portrait, plus tard.
La durée de la pose est inscrite dans le grain de la photo. Peut-être d’autant plus que Martial Verdier laisse jouer, encourage, provoque tous les hasards et accidents, de la prise de vue au développement et au tirage.
Il en résulte vraiment des ambassadeurs : des personnes qui viennent au-devant de nous et par leur regard, leur tenue longtemps, nous parlent.
J’ai écrit ces poèmes dans ces durées, dans ces accidents. Cette suite est une fouille dans les relations induites par ces rencontres - vous les rencontrerez vous aussi. C’est une sorte d’enquête auprès des ambassadeurs - qui êtes-vous, d’où venez-vous, etc. - et c’est une enquête, suivant les expérimentations de Martial Verdier, sur la persistance de l’âme - l’ultime persistance d’un être distinct - malgré les brumes, malgré les incendies – à quel instant, à la perte de quel trait de l’image disparaît-elle ?
Photos et textes se répondent dans un livre édité par Gwen Catala